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Mot de Jean Sadouni …

lors de la messe clôture année pastorale 2024/2025

Beaucoup nous ont demandé de pouvoir relire l’intervention de Jean Sadouni lors de la messe de clôture de l’année pastorale qui marquait aussi la fin de sa mission de Responsable d’Unité Pastorale dans notre Unité Pastorale Boetendael. En voici le texte.:

Chers Frères et Sœurs en Christ,

En mission dans le Corps

En juin 2019, je terminais mon stage dans l’Unité Pastorale Sainte Croix avec comme responsable l’actuel archevêque Mgr Luc Terlinden. Alors que nous nous apprêtions à célébrer la solennité du Saint Sacrement du Corps et du Sang du Christ, j’entends Luc Terlinden dire à l’un des prêtres que la deuxième lecture sera pour Jean. Je ne mesurais pas encore la portée de ce choix, mais en la proclamant je ressentis quelque chose de spécial en moi qui me mettait en paix et en joie.  La semaine qui suivit, je fus appelé par Mgr Jean Kockerols pour me proposer la responsabilité de notre Unité Pastorale. 

Aujourd’hui, 6 ans après mon envoi en mission, c’est encore avec cette solennité du Saint Sacrement du Corps et du Sang du Christ que je m’adresse à vous pour passer la charge pastorale de l’Unité Pastorale à la nouvelle équipe. 

Cette fête du Saint Sacrement du Corps et du Sang du Christ est liée à la mission de l’Eglise. En effet, l’eucharistie est source et sommet de la vie chrétienne, elle nourrit la foi et l’engagement missionnaire, rappelant continuellement le don d’amour du Christ et appelant à le partager. 

Nous sommes le Corps du Christ

Chaque fois, écrit Paul aux Corinthiens en parlant de l’eucharistie, « vous proclamez la mort du Seigneur, jusqu’à ce qu’il revienne. »   La mort n’est pas séparée de la Vie : « jusqu’à ce qu’il revienne ».  Ainsi l’Eucharistie est-elle le sacrement du départ ?  Celui du Christ sans doute qui, avant de les quitter, donne à ses disciples ce signe inégalable de sa présence, car son départ ne signifie pas absence, mais mystérieuse présence livrée au cœur aimant ?  N’a-t-il pas promis : « je suis avec vous jusqu’à la fin des temps » ?  Cette Parole est « la promesse » de Jésus et nous sommes appelés à y entrer par la foi. Elle représente ce que nous avons à vivre après chaque célébration : « une collaboration avec le Christ qui, par son Esprit, nous guide et nous soutient ».  En effet après la messe nous sommes envoyés : « Allez dans la paix du Christ ».  Ce n’est pas un au-revoir poli, c’est un envoi en mission. Le Christ nous dit :
« Maintenant, portez-Moi. Soyez mes mains, soyez mes yeux, soyez mon cœur. »

L’Eucharistie ne reste pas entre les murs de nos églises. Elle nous pousse vers les périphéries, comme disait souvent le Pape François : vers les pauvres, les blessés de la vie, les oubliés. Une Église qui adore sans se donner est incomplète. Une Église qui communie mais qui ne sort pas devient stérile ! 

Saint Augustin disait :

« Ce pain que vous voyez sur l’autel, sanctifié par la parole de Dieu, est le Corps du Christ. […] Et ce que vous êtes, vous le recevez. »

La mission commence là. Pas dans l’activisme ou les grands discours, mais dans la communion, dans cette vie de Dieu qui nous rejoint et qui veut passer à travers nous.

Offerts comme nourriture à tous

Dans l’Evangile de Luc, lorsque les disciples dirent à Jésus qu’il fallait renvoyer les foules dans les villages du voisinage pour qu’ils s’y abritent et se nourrissent, Jésus leur répond : « Donnez-leur vous-même à manger ».  C’est le début de la transition, l’ébauche de ce qu’ils seront appelés à faire après son départ : nourrir les foules à partir de ce qu’ils auront vécu comme expérience de relation avec Lui, et la manière dont cela les a transformés. 

Poursuivre l’œuvre de Jésus dans le souffle de l’Esprit Saint, c’est la mission de tous les baptisés, de tous les chrétiens.

« Donnez-leur vous-même à manger » ne concerne pas uniquement la nourriture.  Cette parole nous pouvons l’entendre aujourd’hui, pour les personnes sans travail, les réfugiés, les personnes en précarité, les malades, les personnes isolées, les sans-emplois souvent victimes d’une culture du profit. Cela concerne également toutes les personnes qui sont aujourd’hui en recherche de sens dans leur vie, perdues dans les méandres d’une société de consommation qui a développé une culture de l’obsolescence programmée, non seulement des objets mais également des hommes et des emplois : il faut constamment se renouveler pour être à la page, Up to date, et quand ce n’est pas le cas (ou trop vieux) …à la casse !  Ce fond « culturel » donne une « société de déchets » en tout genre, qui touche à l’environnement mais également l’homme en créant fragilisation et pauvreté.

Et nourris de ce même Corps.

Commentant ce passage de Saint Luc Saint Jean Paul II écrivait :

« comment ne pas ouvrir nos oreilles et nos cœurs, commençant par mettre à leur disposition les cinq pains et les deux poissons que Dieu a mis dans nos mains ? Nous pouvons tous faire quelque chose pour eux, chacun peut leur apporter sa contribution ».  

Et j’ajouterai que pour cela nous pouvons compter sur Dieu, car comme le dit St Paul dans sa lettre aux Corinthiens

« Et Dieu est assez puissant pour vous donner toute grâce en abondance, afin que vous ayez, en toute chose et toujours, tout ce qu’il vous faut, et même que vous ayez en abondance de quoi faire toute sorte de bien. » ( 2Cor 9, 8)

La nouvelle équipe, le Père Tam et Dominique, avec l’abbé Willy et l’équipe pastorale va poursuivre le travail pastoral que nous avons tous accompli ensemble.  Pas seulement l’Equipe Pastorale d’Unité mais vous aussi, les paroissiens de notre Unité Pastorale.  Car la pastorale n’est pas l’affaire de quelques-uns mais elle est, a toujours été et sera de plus en plus l’affaire de tous. 

Je dois vous avouer que ce n’est pas sans un petit pincement au cœur que je m’adresse à vous aujourd’hui. Seulement, la parole d’un ami m’a fait méditer à ce sujet.

St Paul nous dit :

« Puisqu’il y a un seul pain, nous qui sommes plusieurs, nous formons un seul corps ; car nous participons tous à un même pain. »  (1 Cor, 10, 17). 

Dès lors que je ne suis plus le responsable de l’Unité Pastorale, cela ne nous empêche pas de continuer à former un seul Corps. 

Être Catholiques ?

J’aimerais encore vous partager une chose qui m’occupe depuis un certain temps et sur laquelle je travaille en ce moment, c’est la catholicité. 
Être Catholique n’est pas une marque identitaire. C’est une vocation ! C’est une « note ecclésiologique du Credo » (je crois en l’Eglise Sainte, Catholique et Apostolique)

« La catholicité de l’Eglise n’est pas un statut, pas un privilège mais une vocation !  L’Eglise est appelée à faire œuvre de catholicité ».  (Chapitre 7 et 9 de Mgr de Lubac dans son livre « catholicisme »)

Je cite encore Mgr de Lubac

« quand ils étaient sortis du cénacle, peu nombreux, ils étaient déjà catholiques ! Quand Paul faisait ces grands voyages des villes et des bourgades, l’église était déjà catholique. Cela veut dire que la catholicité de l’Eglise n’est pas proportionnelle à l’étendue de sa surface sociale ».

Quand on a confondu cela, on a confondu mission de l’Eglise et colonisation.
Le Cardinal Jean Marc Aveline de Marseille exprime cela de la manière suivante :

La catholicité, c’est la conscience d’avoir reçu la charge, non pas à cause de ses mérites mais par pure grâce, d’être associé au salut du genre humain tout entier.

La conscience de l’Eglise est qu’aucun humain n’est étranger à l’acte du salut ; c’est pour cela que l’Eglise peut aller partout parce que tout est à elle et elle est au Christ.

Conséquence, nous ne sommes pas missionnés, (baptisés, prêtres, animateur(rice), bénévoles (KT…)), pour les croyants d’un lieu mais pour toute la population sur ce lieu, nous sommes là pour tous, puisque nous participons à la vocation de l’Eglise, à la « catholicité ».  Cela veut dire que sur tous les territoires, même les réseaux sociaux, nous sommes appelés à mettre en route notre vocation de catholicité.  Quand nous comprenons notre vocation de catholicité, cela change beaucoup de choses dans notre compréhension de notre mission.  

Vivre de l’Esprit qui nous rend Inutiles !

Encore deux petites choses à ceux qui me succèdent et à ceux qui répondront à leur appel :

Je vous souhaite de développer l’Eglise en notre lieu en tenant compte de son charisme propre, qui est fondé d’une part sur ce que l’Esprit Saint a soufflé ici à Uccle et ce que les différentes personnes avant nous ont insufflé et mis en œuvre.  Et surtout n’oublions jamais que le Seigneur nous précède en toute chose et qu’en cela nous sommes des serviteurs « inutiles », c’est à dire si je me réfère au grec dans l’Evangile : des serviteurs qui ne le sont pas par nécessité (mais par grâce) !  Cela change tout !

Nous coopérons constamment à ce que fait l’Esprit Saint. Nous ne sommes pas seul. Et surtout, restons les destinataires du message que nous portons et que nous proclamons.  La conversion de l’autre est aussi la nôtre.  Il n’y a rien de pire que lorsque nous sommes face à une conversion, de ne pas reconnaître que nous même sommes toujours en travail de conversion.  Car pour rendre effective la conversion de l’autre, il faut qu’elle aille de pair avec la mienne. C’est pour cela que je vous adresse un tout grand merci à tous pour votre accueil et votre collaboration durant ces six années pastorales.

MERCI A TOUS POUR TOUS CE QUE VOUS M’AVEZ APPORTE

JEAN