Homélies/Méditation

Du malentendu à l’ « entendre »

L’aveugle né.

Selon le 4ième évangile, le « Verbe de Dieu fait chair » se présente dans la chair des entretiens entre Jésus et celles et ceux qu’il croise sur la route. L’évangéliste utilise la technique littéraire du malentendu qui se présente tout simplement parce que nous ne sommes pas d’emblée accordés les uns aux autres ; il y a comme un voile entre nous.

Le malentendu peut dégénérer en « dureté du cœur », en refus de comprendre et, finalement, en violence. L’autre possibilité est de comprendre progressivement. Le malentendu conduit alors à un « entendre » : entendre les autres et, dans la mesure où on les entend, s’entendre réellement soi-même. C’est ce qui se passe dans les dialogues de Jésus. (d’après « le courage de penser l’avenir » de Christophe Théobald, Cogitation Fidei , Cerf 2021 page 412)

Prenons cette fois l’évangile de ce dimanche, dit « de l’aveugle-né ».
Au départ, il y a pour les disciples la question de la rétribution : « Rabbi, qui a péché, lui ou ses parents, pour qu’il soit aveugle ? » Jésus a toujours été clair sur cette question : Dieu n’a rien à voir avec les malheurs de nos existences. Mais il leur dit la même chose que dans l’épisode de la Samaritaine «ma nourriture est de faire la volonté de celui qui m’a envoyé», ici «il nous faut travailler aux œuvres de Celui qui m’a envoyé».

Le malentendu porte ensuite sur la loi du sabbat et va envenimer le débat avec les pharisiens. Ceux-ci ne supportent pas le fait que Jésus fasse des guérisons le jour du sabbat, mais ils sont divisés, car on n’a jamais vu un aveugle de naissance guérir ! Le dialogue entre les pharisiens et l’aveugle se poursuit, pour les uns vers le refus et le rejet, pour lui vers la lumière.

Les pharisiens chercheront d’abord à nier le fait, ils interrogeront même ses parents, puis lui demanderont par deux fois de leur dire ce qui s’est passé, puis à opposer Moïse dont ils se disent les disciples et l’aveugle, disciple de Jésus. Cela finira pour eux par l’invective et l’expulsion. Et quand à la fin, Jésus dira haut et fort son jugement sur ceux qui voient et ceux qui ne voient, ils comprendront que c’est d’eux qu’il parle. Pour Jésus désormais, « leur péché demeure ».

D’emblée, après avoir dit succinctement ce qui lui est arrivé, l’aveugle proclame que celui qui l’a guéri est « un prophète ». Poussé dans ses retranchements successifs, l’aveugle commence par le récit de ce qui lui est arrivé, il lui faudra le répéter trois fois, mais exaspéré par un tel déni, il finit par exprimer sa conviction que celui qui l’a guéri, est « de Dieu ». Il rencontre enfin Jésus à qui il demande en qui il est invité à croire. Jésus répond « Tu le vois, et c’est lui qui te parle ». (Rappelons-nous à ce propos la réponse de Jésus à la samaritaine : « Je le suis, moi qui te parle »). « Je crois, Seigneur » et il se prosterna devant

Robert Borremans

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